Le gouvernement britannique a annoncé jeudi qu’il présenterait vendredi aux députés, pour la troisième fois, son accord de Brexit qui, s’il est adopté, conduira la Première ministre conservatrice Theresa May à quitter son poste.
« Une motion sur le retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne sera présentée vendredi », a annoncé la ministre des Relations avec le Parlement, Andrea Leadsom, aux députés, qui ont déjà rejeté ce texte par deux fois, le 15 janvier et le 12 mars.
Reste à savoir si le président de la Chambre des communes, le speaker John Bercow, acceptera la tenue d’un troisième vote : il l’avait rejetée la semaine dernière au motif que le parlement ne peut pas réexaminer un texte inchangé au cours de la même session parlementaire.
« Nous reconnaissons que toute motion présentée demain (vendredi) devra être conforme aux décisions du speaker et que la discussion se poursuit », a dit Mme Leadsom.
Pour contourner l’obstacle, le gouvernement pourrait présenter seulement l’accord de retrait – qui règle les questions de la frontière irlandaise, des droits des citoyens expatriés et la facture à régler par Londres- et pas la déclaration politique qui l’accompagne, qui porte sur la relation future entre l’UE et le Royaume-Uni.
Pas encore confirmée, la manoeuvre a déjà été condamnée par l’opposition. « Nous quitterions l’UE mais sans avoir la moindre idée d’où nous irions », s’est insurgé Keir Starmer, le porte-parole du Labour pour le Brexit. « Ce n’est pas acceptable et le Parti travailliste s’y opposera ».
– Sacrifice vain ? –
Jouant sa dernière carte, Theresa May a mis mercredi soir sa démission dans la balance pour convaincre les députés d’adopter l’accord, rejeté massivement en janvier et mi-mars. Depuis, certains élus conservateurs conditionnaient leur soutien à l’accord à son départ.
« Son sacrifice sera-t-il vain? » se demandait jeudi le Daily Mail.
L’ex-ministre des Affaires étrangères Boris Johnson, rival de Theresa May et fervent défenseur d’un Brexit sans accord, a annoncé qu’il se rangeait désormais derrière le texte. Et selon un décompte du Sun, le nombre de « rebelles » conservateurs serait redescendu à 16.
Mais pour que la troisième tentative soit la bonne, Mme May a besoin du soutien du DUP, dont dépend sa faible majorité au Parlement. Tous les yeux sont donc rivés sur le parti nord-irlandais qui a répété mercredi soir qu’il ne fallait pas compter sur lui.
Ses dix députés rejettent toujours le « filet de sécurité », estimant qu’il « fait peser une menace inacceptable sur l’intégrité du Royaume-Uni ».
Ce dispositif de dernier recours a été élaboré pour éviter le retour d’une frontière physique entre la province britannique d’Irlande du Nord et sa voisine la République d’Irlande. Il maintiendrait le Royaume-Uni dans une union douanière avec l’Union européenne, avec un alignement plus poussé sur les normes de l’UE pour Belfast.
– « Non. Non. Non… » –
A la Chambre des communes, l’initiative parlementaire visant à dégager une solution alternative à l’accord négocié par le gouvernement avec Bruxelles a tourné court mercredi soir.
Les députés ont voté contre les huit options qu’ils avaient eux-mêmes proposées, allant d’un divorce sans accord à une révocation de l’article 50 du Traité de Lisbonne qui régit la sortie d’un pays membre de l’UE.
« Le Parlement a finalement eu son mot à dire: Non. Non. Non. Non. Non. Non. Non. Non. », a ironisé le quotidien The Guardian.
Sans obtenir de majorité, deux scénarios se sont toutefois distingués: un nouveau référendum sur l’accord qui sera conclu avec l’UE et rester dans l’union douanière, ce que l’accord de Mme May exclut.
Une nouvelle série de votes indicatifs doit être organisée lundi sur les options préférées des députés, mais elle est conditionnée au résultat du vote sur l’accord vendredi.
Le monde économique n’a pas mâché ses mots après le spectacle « frustrant » offert par les élus britanniques.
« Vous avez laissé tomber les entreprises britanniques », a accusé le directeur général des Chambres de commerce britanniques, Adam Marshall. Avant de les enjoindre « d’arrêter de se bercer d’illusions ».
Alors que le Brexit était censé avoir lieu vendredi à 23H00 GMT, les dirigeants européens ont accordé un délai à Londres, avec deux options : soit l’accord de retrait est adopté cette semaine et la date du retrait britannique sera repoussée jusqu’au 22 mai; soit l’accord est rejeté, et Londres aura jusqu’au 12 avril pour présenter une alternative et demander un nouveau report. Sinon, ce sera une sortie brutale, sans accord.
Source AFP