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Le dépistage du cancer du poumon peut sauver des vies, mais il présente aussi de sérieux inconvénients

Le cancer du poumon est une maladie fréquente, mais qui, malheureusement, n’est actuellement souvent découverte qu’à un stade avancé, lorsque les chances de guérison sont très limitées. Il ressort des chiffres belges récents de la mortalité par cancer que le cancer du poumon est la première cause de mortalité oncologique dans notre pays.

La mesure la plus efficace et coût-efficace pour prévenir le cancer du poumon est d’arrêter de fumer ou, mieux, de ne jamais commencer. De plus en plus de voix s’élèvent toutefois aussi pour soumettre régulièrement les personnes à haut risque de cancer du poumon, comme p.ex. les gros (ex-)fumeurs, à un dépistage au moyen d’un CT-scan à faible dose (LDCT). Les possibilités de traitement et les chances de guérison sont en effet nettement meilleures à un stade précoce.

Contrairement à ce que l’on aurait tendance à supposer intuitivement, le dépistage comporte toutefois aussi des inconvénients tant pour les participants eux-mêmes que pour la société. Avant de décider d’organiser un dépistage au sein de la population, les autorités doivent donc soigneusement peser ses avantages et inconvénients. Le citoyen aussi doit être clairement informé de ces avantages et inconvénients pour pouvoir poser un choix éclairé ; il s’agit là d’une obligation éthique, même s’il en découle un plus faible taux de participation au dépistage.

Le KCE a été chargé d’investiguer l’efficacité, la sécurité et le rapport coût-efficacité d’un éventuel dépistage du cancer du poumon dans notre pays. Les résultats de cette étude sont présentés dans la figure ci-dessous, qui illustre les conséquences du dépistage pour 1000 personnes à haut risque.

Un équilibre délicat entre avantages et inconvénients

Il ressort de l’examen de la littérature que le dépistage du cancer du poumon permet effectivement d’abaisser la mortalité par cancer du poumon de 21 % et la mortalité générale de 5 % chez les personnes qui y participent. Appliquée à la Belgique, notre analyse révèle ainsi que, si 1000 personnes à haut risque participent à trois tours de dépistage, celui-ci aura permis de sauver 3 vies 10 ans plus tard.

D’un autre côté, un certain nombre de participants seront inutilement inquiétés par un résultat dit faux positif. Ces personnes devront subir des examens invasifs supplémentaires tels que des biopsies, des bronchoscopies ou même des interventions chirurgicales. À côté du stress inutile qu’elles engendrent, ces procédures peuvent aussi entraîner des complications. En outre, un certain nombre de participants recevront un résultat indéterminé (non concluant) imposant la réalisation d’un nouveau CT-scan, avec le stress, les désagréments et les coûts supplémentaires qui en découlent.

Chez certains participants, le dépistage amène par ailleurs à diagnostiquer et à traiter des tumeurs qui, si elles n’avaient pas été identifiées, n’auraient évolué que très lentement voire pas du tout et n’auraient représenté aucun danger, parce que le patient serait mort de vieillesse ou d’une autre maladie avant qu’elles ne deviennent éventuellement problématiques (surdiagnostic et surtraitement).

Comme l’examen de dépistage porte sur l’ensemble du thorax, il met parfois aussi en lumière des problèmes de santé au niveau d’autres organes (cœur, œsophage, etc.). C’est ce que l’on appelle des découvertes fortuites. Celles-ci donnent lieu à des examens complémentaires parfois invasifs, dont certains s’avèrent par la suite inutiles. Il n’est pas encore clair actuellement si ces découvertes fortuites représentent finalement un avantage pour les participants, ou plutôt un inconvénient.

Un certain nombre de cancers d’évolution rapide vont par ailleurs se manifester entre deux dépistages. Ce sont les « cancers d’intervalle ». Il faut donc veiller à ce que la participation au dépistage ne créé pas une impression trompeuse de sécurité.

À plus long terme, il existe aussi un faible risque de cancer dû à l’exposition répétée aux rayons nocifs du CT-scan, même faiblement dosé.

Ces avantages et inconvénients ont tous leur importance et doivent donc être mûrement pesés les uns par rapport aux autres.

Le dépistage du cancer du poumon en Belgique serait-il un investissement payant ?

Le KCE a calculé que, dans notre pays, le dépistage du cancer du poumon déboucherait sur un rapport coût-efficacité différentiel de €18 530 par année de vie gagnée en bonne santé. Un certain nombre d’éléments ont un impact majeur sur ce rapport coût-efficacité, comme le nombre de surdiagnostics, les ristournes confidentielles sur certains traitements anticancéreux, les coûts engagés pour atteindre et inviter le groupe-cible et le nombre de participants au dépistage.

Le dépistage du cancer du poumon peut donc être coût-efficace si les autorités sont prêtes à payer plus de €20 000 par année de vie gagnée en bonne santé.

Il appartient maintenant aux décideurs politiques de poser un choix mûrement réfléchi sur la base de ces données et d’éventuels autres facteurs. Idéalement, les autorités devraient notamment examiner au préalable dans quelle mesure le groupe-cible serait disposé à participer au dépistage après avoir été correctement informé de tous les avantages et inconvénients. Il est aussi important d’évaluer en amont l’impact du dépistage sur le budget de la santé et sur le système de soins (en termes de disponibilité des prestataires et de l’appareillage nécessaire).

Figure illustrant l’impact d’un dépistage réalisé chez 1000 personnes

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