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Les États doivent redoubler d’efforts contre l’intolérance fondée sur la religion ou les convictions

Au-delà des mots, les êtres humains communiquent par des symboles. Une bague marque notre engagement à nous marier. Une lumière colorée nous signale de nous arrêter ou de partir. Les symboles religieux vont beaucoup plus loin. Un croissant, une étoile, une croix, un personnage assis : pour certains, cela peut signifier peu, mais pour des millions de personnes, ils ont une signification profonde en tant que dépositaire et incarnation d’une immense histoire, d’un système de valeurs de grande envergure, d’un fondement de la communauté et de l’appartenance collectives, et l’essence de leur identité et de leurs croyances fondamentales.

L’abus ou la destruction des manifestations de nos croyances les plus profondes peut polariser les sociétés et aggraver les tensions.

Ce débat urgent est motivé par des incidents récents d’incendie du Coran, qui est au cœur de la foi de plus d’un milliard de personnes. Ces incidents et d’autres semblent avoir été fabriqués pour exprimer le mépris et attiser la colère; creuser des fossés entre les gens; et de provoquer, transformant les différences de perspective en haine et, peut-être, en violence.

Donc, le premier point que je veux faire ici est le suivant : en mettant de côté pour un instant la question de savoir ce que la loi stipule est permis ou non, et indépendamment de ses propres croyances religieuses ou de son manque de croyance, les gens doivent agir dans le respect des autres. Tous les autres.

mettant de côté pour un instant la question de savoir ce que la loi stipule est permis ou non, et indépendamment de ses propres croyances religieuses ou de son manque de croyance, les gens doivent agir dans le respect des autres. Tous les autres

Volker Türk, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme (11 juillet 2023 au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies à Genève)

Ce n’est qu’ainsi qu’un dialogue soutenu devient possible. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons avoir une conduite entre les êtres humains qui nous permette de relever, ensemble, les défis auxquels nous sommes confrontés.

Pourtant, le vandalisme de sites religieux et la destruction d’icônes, de textes sacrés pour leurs fidèles et d’objets religieux ont été utilisés pour insulter et provoquer les gens pendant des siècles. Pour moi, il est clair que les discours et les actes incendiaires contre les musulmans ; Islamophobie; antisémitisme; et les actions et les discours qui ciblent les chrétiens – ou des groupes minoritaires tels que les ahmadis, les bahá’ís ou les yézidis – sont des manifestations d’un manque de respect total. Ils sont offensants, irresponsables et erronés.

Il est important de rappeler l’immense bénéfice de la diversité pour toutes les sociétés. Tous les peuples ont un droit égal de croire ou de ne pas croire : c’est le fondement de la Déclaration universelle des droits de l’homme qui nous unit. Nous devons promouvoir l’harmonie interconfessionnelle et le respect mutuel, dans l’intérêt de toutes les communautés.

Les dirigeants politiques et religieux ont un rôle particulièrement crucial à jouer en s’exprimant clairement, fermement et immédiatement contre le manque de respect et l’intolérance – non seulement envers leurs propres communautés, mais envers tout groupe victime d’attaques. Ils doivent également préciser que la violence ne peut être justifiée par une provocation préalable, réelle ou perçue.

la violence ne peut être justifiée par une provocation préalable, réelle ou perçue

Volker Türk, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme (11 juillet 2023 au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies à Genève)

Monsieur le Président,

Ce sont des domaines complexes. La limitation de tout type de parole ou d’expression doit, en tant que principe fondamental, rester une exception – d’autant plus que les lois limitant la parole sont souvent utilisées à mauvais escient par les personnes au pouvoir, notamment pour étouffer le débat sur des questions critiques.

Mais d’un autre côté, un acte de parole, dans les circonstances particulières où il se produit, peut constituer une incitation à l’action de la part d’autrui — dans certains cas, une action très violente et discriminatoire. Ces dernières années, de nombreux actes de violence, attaques terroristes et atrocités de masse ont visé des personnes en raison de leurs croyances religieuses, y compris à l’intérieur de leurs lieux de culte.

Le droit international est clair sur ce genre d’incitation. Article 20 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques stipule : Les États parties doivent, sans exception, interdire « tout appel à la haine nationale, raciale ou religieuse qui constitue une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence ».

Afin de mieux comprendre comment cela doit être appliqué, mon Bureau a organisé en 2011 une série d’ateliers régionaux qui ont abouti à la Plan d’action de Rabat. Cela fournit un seuil en six étapes concernant le contexte, le locuteur, l’intention, le contenu, l’étendue et la probabilité du préjudice, pour aider à distinguer la liberté d’expression de l’incitation à la violence.

En fin de compte, l’application de l’article 20 du PIDCP est une question qu’il appartient aux législateurs et aux tribunaux nationaux de déterminer dans un cas particulier. Ils doivent le faire d’une manière compatible avec les garde-fous prévus par le droit international des droits de l’homme. Toute restriction nationale au droit primordial à la liberté d’opinion et d’expression doit être formulée de manière à ce que son seul objectif et résultat soit de protéger les individus – plutôt que de soustraire la doctrine religieuse à un examen critique.

Mon deuxième point est celui-ci : l’appel à la haine qui constitue une incitation à la violence, à la discrimination et à l’hostilité devrait être interdit dans tous les États.

Monsieur le Président,

Bien qu’elles ne soient pas considérées comme incitant à la violence, d’autres formes d’expression peuvent équivaloir à discours de haines’ils utilisent un langage péjoratif ou sectaire à l’égard d’une personne ou d’un groupe sur la base de son sexe, de ses convictions, de sa race, de son statut migratoire, de son orientation sexuelle ou de tout autre facteur inhérent à sa personne ou à son identité, cherchant à porter atteinte à sa dignité et à diminuer sa valeur dans les yeux des autres.

J’aimerais développer : déshumaniser les femmes et nier leur égalité avec les hommes ; agresser verbalement des femmes et des filles musulmanes qui portent un foulard ; se moquer des personnes handicapées; faire de fausses déclarations selon lesquelles les migrants ou les personnes d’ethnies spécifiques sont plus susceptibles de commettre des crimes ; ou calomnier les personnes LGBTIQ+ : tous ces discours de haine sont similaires, en ce sens qu’ils découlent de la notion de base selon laquelle certaines personnes méritent moins le respect en tant qu’êtres humains.

Propulsés par les forces de marée des médias sociaux, et dans un contexte de discorde et de polarisation internationales et nationales croissantes, les discours de haine de toutes sortes augmentent, partout. Elle est nocive pour les individus et porte atteinte à la cohésion sociale nécessaire au bon fonctionnement de toutes les sociétés.

Mon troisième point, alors : le discours de haine doit être combattu, dans toutes les sociétés, par le dialogue, l’éducation, la sensibilisation, l’engagement interreligieux et intercommunautaire et d’autres outils de politique publique. Elle doit être activement combattue par toutes les autorités responsables, les personnalités influentes et le secteur privé.

Le Stratégie et plan d’action des Nations Unies contre le discours de haine est la réponse de l’ONU pour faire face à ce phénomène et aider les États à le contrer.

Des stratégies de prévention efficaces mises en place par les autorités nationales et autres peuvent identifier et traiter les causes sous-jacentes du discours de haine. J’encourage les États à redoubler d’efforts pour mettre en œuvre le plan d’action de lutte contre l’intolérance fondée sur la religion ou la conviction qui a été défini par le Conseil des droits de l’homme résolution 16/18 et via le Processus d’Istanbul. Comme je l’ai souligné dans mon article connexe rapport plus tôt cette année, le matériel pédagogique et l’apprentissage entre pairs devraient promouvoir le respect du pluralisme et de la diversité dans le domaine de la religion ou de la conviction. Les échanges de leçons apprises et de pratiques prometteuses devraient continuer à être encouragés, y compris avec le soutien de nos Cadre Foi pour les droits.

Monsieur le Président,

De nombreuses sociétés luttent contre cette militarisation des différences religieuses à des fins politiques. Nous ne devons pas nous laisser entraîner et instrumentaliser par ces marchands de chaos à des fins politiques, ces provocateurs qui cherchent délibérément à nous diviser.

Je suis extrêmement sympathique aux millions de personnes qui sont offensées et scandalisées par des actes qui ciblent leurs valeurs et leurs croyances les plus profondes.

Mon objectif primordial aujourd’hui est de reconnaître le profond enrichissement de chacun d’entre nous qui résulte de notre diversité, de notre compréhension de l’existence humaine, de nos pensées et de nos croyances. Nos sociétés – toutes nos sociétés, quelles que soient leurs origines religieuses et culturelles – doivent s’efforcer de devenir des aimants pour le respect, le dialogue et la coopération entre les différents peuples, comme l’ont fait de multiples civilisations dans le passé.

Promouvoir la paix et la sécurité internationales ; un tissu social riche, sécuritaire et respectueux; ainsi que des économies et des sociétés qui peuvent pleinement bénéficier des contributions de tous leurs membres, nous devons nous engager à faire progresser la tolérance ; un plus grand respect; et une plus grande reconnaissance de la l’importance et la valeur de nos différences.

Dans les médias. En ligne. Dans les entreprises. Dans les écoles. Au gouvernement. Dans la police. Et aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur des lieux de culte. La meilleure façon de lutter contre le discours de haine est d’avoir plus de dialogue, plus de conversations, plus de construction d’une compréhension commune et plus d’actes qui manifestent notre conviction que nous sommes tous égaux.

Que nous avons tous des droits, y compris le droit d’avoir des croyances différentes, d’adopter des modes de vie différents et d’avoir et de partager des opinions différentes.

J’espère que ce Conseil sera en mesure de débattre de ces questions complexes dans l’esprit d’unité, d’engagement constructif, de respect mutuel et de réflexion approfondie qu’elles méritent.

Merci

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