
Le Maroc est plongé dans l’effroi après la révélation d’un crime d’une brutalité inouïe : 14 collégiennes et lycéennes, âgées de 12 à 17 ans, auraient été violées et exploitées sexuellement au sein d’un réseau de prostitution clandestin, orchestré par des individus dans le village isolé de GuiGou, au sud de Fès. Les enquêtes préliminaires indiquent que ces actes horribles se seraient déroulés dans une maison tenue par une personne soupçonnée de proxénétisme. Alors que trois victimes ont eu le courage de témoigner devant la justice, d’autres, terrorisées par des menaces, continuent de se taire.
Cette affaire soulève des préoccupations profondes concernant la protection des mineurs au Maroc et met en lumière la responsabilité de l’État. Le pays, qui a ratifié la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE) en 1993, est censé garantir la protection des enfants contre toute forme d’exploitation et de violence sexuelle. Cependant, les événements récents révèlent un écart alarmant entre les engagements pris sur le papier et la réalité sur le terrain. En 2011, le Maroc a également adopté le Protocole facultatif sur la vente d’enfants et la prostitution des mineurs, mais ces textes ne semblent pas suffire à protéger nos enfants.
Une enquête menée par le Haut-Commissariat au Plan (HCP) en 2018 a révélé que 54,4 % des enfants marocains ont subi une forme de violence, que ce soit physique, psychologique ou sexuelle, dont 14 % dans le cadre scolaire. En 2020, le ministère public a enregistré 17 448 cas de violence contre des femmes et des filles, dont 32 % concernaient des mineures. Ces chiffres ne représentent probablement qu’une fraction de la réalité, car moins de 10 % des abus sexuels sur enfants sont effectivement signalés, en raison de la stigmatisation et de la méfiance envers les institutions.
Le Code pénal marocain prévoit des peines allant de 5 à 30 ans de prison pour les agressions sexuelles sur mineurs, mais l’application de la loi est souvent jugée trop laxiste. Les arrangements à l’amiable continuent d’être la norme, surtout dans les zones rurales où les familles, par crainte du déshonneur, choisissent souvent de cacher ces affaires. Cette culture du silence, aggravée par la complicité de certains membres des forces de l’ordre, érode la confiance du public envers l’État. Comment espérer que les victimes se manifestent si elles savent qu’elles ne peuvent pas compter sur la protection de ceux qui sont censés les défendre ?
Malgré ces défis, le royaume a mis en place plusieurs initiatives, comme la création de cellules d’accueil pour enfants victimes dans les tribunaux et le lancement d’une stratégie nationale de protection de l’enfance. Cependant, ces efforts semblent insuffisants face à un problème structurel. Dans les milieux ruraux, où les normes patriarcales demeurent ancrées, l’accès à l’éducation est souvent limité. De nombreuses filles quittent l’école prématurément, les rendant particulièrement vulnérables à l’exploitation.
Sous la pression des médias, les autorités promettent une réponse ferme. Les individus impliqués dans cette affaire risquent des peines lourdes, mais cela ne suffit pas à rassurer ceux qui défendent les droits de l’enfant. La véritable question réside dans la capacité de l’État à protéger les témoins et à démanteler les réseaux criminels qui exploitent les plus vulnérables. Des campagnes de sensibilisation doivent être mises en place dans les écoles et les mosquées pour promouvoir les droits des enfants et encourager un changement de mentalité au sein des communautés.
Ce crime odieux doit servir d’électrochoc, incitant le Maroc à transformer ses engagements juridiques en actions concrètes. Chaque jour qui passe sans une véritable action est un jour de perdu pour ces enfants, qui méritent d’être protégés et de grandir dans un environnement sûr. Comme le souligne l’UNICEF : « Aucune société ne peut prospérer en laissant ses enfants derrière. » Le moment est venu pour le gouvernement marocain de prendre ses responsabilités et de garantir un avenir meilleur à ses jeunes générations.