La Belgique n’en fait pas assez pour lutter contre la corruption. C’est le principal enseignement d’un rapport de l’OCDE qui a passé au crible les dispositifs belges de lutte contre la corruption.
La Belgique au centre des affaires de corruption internationale
Entre le Qatargate, l’affaire Huawei, la montée en puissance du narcotrafic, le constat est clair : la Belgique, petit pays au cœur d’un carrefour commercial et diplomatique international, est particulièrement à risque de corruption. En particulier de corruption internationale, de la part d’autres États, de grands groupes privés ou des mafias.
Signalons d’abord que le rapport pointe une série d’avancées, comme la protection des lanceurs d’alerte. Mais, est-ce que notre pays dispose de moyens de lutte à la hauteur de ce défi ? La réponse transpire du rapport de l’OCDE : c’est plutôt non. Non pas que nous n’ayons rien fait, mais c’est clair, nous n’avons pas fait assez.
Et je ne vais pas passer du temps à enfoncer une porte ouverte… et vous rappeler ce que tout le monde sait déjà : c’est un enjeu déterminant pour assurer une stabilité politique et sociale.
Manque de moyens anti-corruption
Le bulletin n’est donc pas très bon. Qu’est-ce que la Belgique ne fait pas bien ? D’abord, pas assez de moyens pour faire fonctionner les structures. Même si la Belgique a pris des décisions importantes ces dernières années, leur mise en œuvre reste insuffisante à cause du manque de moyens. Les enquêteurs de l’OCDE pointent par exemple que le nombre d’enquêteurs à l’Office central de répression de la corruption n’a presque pas augmenté en 10 ans, alors que le risque de corruption a augmenté. De même, quand les enquêtes aboutissent malgré tout devant les tribunaux, là c’est la charge de travail des magistrats qui est trop importante pour traiter des dossiers très techniques et longs. Les corrupteurs et les corrompus peuvent ainsi tabler sur un enlisement de leur dossier et espérer soit sur une transaction pénale, soit sur un non-lieu pour dépassement du délai raisonnable. Ainsi, sur presque 10 ans, le rapport pointe que seulement trois dossiers de corruption internationale ont abouti à des condamnations.
Manque de culture
Manque de moyens, et manque de culture anti-corruption. C’est l’autre élément pointé. Outre des moyens, la Belgique doit développer une stratégie nationale de lutte contre la corruption internationale et en faire une priorité de sa politique criminelle. Sensibiliser les acteurs, mieux s’organiser. Je ne vais pas vous citer tous les points évoqués. Un revient avec insistance : la Belgique doit revoir son dispositif de transaction pénale. Actuellement, le dispositif est opaque, on ne connaît pas les montants payés par les accusés pour éviter un procès et une condamnation. Il faut, dit l’OCDE, rendre publics ces éléments clés et s’assurer que les sanctions prévues soient dissuasives.
Je vous lis ce passage du rapport : « À plusieurs reprises lors de la visite sur place, les intervenants ont fait référence à une perception de « justice de classe », de « privilège » réservé aux grandes entreprises. Pour beaucoup, la transaction est un moyen d’échapper au débat public et son opacité semble la rendre effectivement intéressante pour les entreprises incriminées« .
Bref, alors que tout le monde parle de réarmement militaire pour protéger les démocraties européennes, il y a là un réarmement tout aussi décisif à réaliser pour tenter de rétablir la confiance dans les institutions.