Une lettre ouverte en soutien à Marie Gilow, adressée à la ministre de l’Asile et de la Migration Anneleen Van Bossuyt (N-VA), a été publiée le 28 mars sur le site de la Ligue des Droits Humains, signée par près de 170 personnes du monde académique, associatif, et culturel, dont les frères Dardenne. « Peut-on faire de la ‘propagande haineuse’ pour la liberté, la solidarité ou l’égalité ? », questionne ce texte, qui a également été signé par l’avocate bruxelloise Selma Benkhelifa.
Elle indique aux Grenades : « L’OCAM et la sûreté de l’État considèrent que tout le mouvement kurde est lié au PKK, et c’est un vrai problème, notamment en raison de l’opacité avec laquelle on peut être placé·e sur la liste de l’OCAM. L’hypothèse vers laquelle tend l’affaire qui concerne Marie Gilow en ferait un cas différent parce que cela touche les Kurdes d’habitude, et qu’elle n’est pas Kurde, mais cela ne serait pas vraiment un cas isolé. »
L’avocate a signé la lettre ouverte « en solidarité avec Marie Gilow« , mais aussi parce qu’elle a défendu des personnes directement concernées. Elle a d’ailleurs publié un article dans la revue française Planète Paix, en mars 2025, relatant l’histoire d’« Axin, une petite fille kurde de douze ans à qui la nationalité belge a été refusée parce que ses parents étaient soupçonnés de l’élever dans les valeurs ‘non démocratiques’, alors même que leur casier judiciaire est vierge, qu’ils n’ont commis aucun crime, simplement participé à des manifestations. C’est leur engagement que leur reproche le juge belge. Il y a un climat de suspicion envers les personnes kurdes, à cause de cet amalgame qui est fait avec le PKK« , souligne-t-elle.
Autre cas emblématique et médiatisé selon les personnes rencontrées pour cet article : celui de l’activiste belgo-turc Bahar Kimyongür, qui dure depuis plus de 10 ans. Plus récemment, en avril 2024, la police belge s’est rendue, en nombre et armée d’un canon à eau, dans les locaux des deux médias kurdes en Flandre à la recherche de preuve de financement du terrorisme, ce qui a été vivement dénoncé par les responsables de ces chaines de télévision. « Tout ce que nous faisons ici, c’est informer le peuple kurde et faire l’actualité. Rien n’est secret ou caché et nous sommes droits dans nos bottes. Cette descente coïncide avec la journée des journalistes kurdes et montre qu’il s’agit d’une attaque contre la liberté de la presse », ont-ils expliqué à Het Laatste Nieuw.
« A cause de l’opacité des procédures, ce ne sont pas des affaires qui aboutissent souvent devant les tribunaux lorsqu’ils sont saisis. Ce qui me fait dire que ce sont surtout des procédures d’intimidation. Si d’autres femmes féministes, au CPAS ou au chômage par exemple, se disent qu’elles risquent d’avoir des gros problèmes pour avoir pris la parole en faveur des femmes kurdes, cela peut tout à fait les inciter à ne pas le faire. On appelle cela le ‘chilling effect’ en sociologie du droit », précise Selma Benkhelifa.