On n’y croyait plus, au presque. La commune de Schaerbeek va enfin retirer son bonnet d’âne LOL de dernière commune du pays sans nouveau bourgmestre, sans nouvelle équipe dirigeante. Le MR et le PS ont annoncé hier soir qu’ils se partageaient le poste de maïeur.
Selon l’interlocuteur avec qui vous causez, les explications sur l’origine de l’accord divergent quelque peu. Mais en gros, il était temps d’arrêter les grotesqueries dans la cinquième commune la plus peuplée du Royaume. Disons qu’il s’agit d’une forme de « bénéfice collatéral » des discussions qui sont dans l’impasse au niveau de la région bruxelloise. Cela a été plusieurs fois raconté, sous le manteau, que la situation à Schaerbeek s’arrangerait d’elle-même une fois qu’à la Région, on arriverait à un accord. Cette semaine, ça aurait pu s’arranger, sauf que non, la faute à un skieur libéral flamand, je vous renvoie à la séquence de Bertrand Henne d’hier matin, je ne vais pas y revenir.
Un négociateur me disait hier soir qu’on était carrément au milieu du lac à la région, un autre qu’on n’était pas si loin d’un accord. Mais quoi qu’il en soit, les gens se sont parlé, en l’occurrence, Georges-Louis Bouchez (MR) et Ahmed Laaouej (PS) qui étaient à la table bruxelloise, et s’il n’était pas possible d’avancer concrètement pour la formation d’un gouvernement, les deux hommes ont évoqué Schaerbeek. Et tels Barry Wilmore et Sunita Wiliams, les astronautes coincés sur la station spatiale internationale pendant neuf mois, un miracle est apparu place Collignon, devant la maison communale, avec un accord.
Ça coince à la Région, donc ça se décoince à Schaerbeek
Cela paraît un peu tordu, et ce n’est pas le genre de choses qui se diront face à un micro, mais c’est plus ou moins ça. Soyons de bon compte, l’idée de partager le maïorat entre les deux partis n’est pas neuve du tout, déjà en novembre, c’était sur la table, avec un drôle de découpage d’ailleurs, cinq ans pour le PS, un an pour le MR. Proposition vite balayée. Ici, c’est un partage 50/50, pas en année, vu que ça a traîné, mais on va compter en mois.
Donc, disons que le mandat commence le mois prochain, en avril, il reste 67 mois avant les élections d’octobre 2030, le passage de témoin se fera quelque part au mois de janvier 2028. C’est le MR qui prend la main d’abord, le PS va finir le mandat.
C’est toujours mieux de finir un mandat, c’est comme au football quand on fait pile ou face avant le match : l’équipe qui joue à domicile préfère choisir son camp, pour pouvoir attaquer vers son kop en deuxième mi-temps, et ainsi finir le match en force.
MR et PS sauvent les apparences
On aurait pu arriver bien plus vite à cette solution, mais depuis le 13 octobre dernier, ça n’a été qu’une suite de séquences, à d’autres niveaux de pouvoirs, ou entre des gens qui ne sont pas Schaerbeekois, ou entre Schaerbeekois mais qui ne se parlaient pas, si ce n’est pas presse interposée.
Les mots ont été durs, des deux côtés, c’est devenu une question de principe, des deux côtés. Il a fallu – et ce n’est pas totalement anormal, d’un point de vue humain et politique – du temps pour passer à autre chose. Et cinq mois plus tard, on y est enfin, parce que PS et MR s’y retrouvent.
Chacun a fait un pas vers l’autre, ça permet aussi de montrer, pour Ahmed Laaouej qu’il n’est pas le grand méchant loup incapable de boucler le moindre accord, comme le raconte la presse flamande ou certains éditos. Georges-Louis Bouchez a eu ce qu’il voulait, le poste de bourgmestre pour son parti, même si c’est un demi-mandat.
A charge pour Audrey Henry et Hasan Koyoncu de mettre désormais tout cela en musique. L’accord de majorité doit encore être discuté, avec Ecolo, avec la liste de l’ancien bourgmestre, Bernard Clerfayt. Un squelette d’accord existe déjà.
Pour un programme qui ne sera forcément pas très engageant. La commune n’a pas d’argent, elle a perdu plus de 3000 habitants en 5 ans, elle connaît des difficultés importantes de mobilité dans le bas de la commune.
Mais pour les deux partis, il s’agit d’un moment symbolique important. Le dernier bourgmestre libéral de Schaerbeek avait pour nom Roger Nols. Et avant lui, il faut remonter à 1970, Gaston Williot. Audrey Henry va donc pouvoir redorer le blason libéral de la commune. Les socialistes, eux, auront pour la première de leur histoire un bourgmestre à la tête de cette commune.
On comprend aussi, pourquoi, pour les deux partis, c’était important de marquer l’histoire.
Un dernier mot : ce deal schaerbeekois ne préfigure en rien un accord à la Région. Vraiment. Là, on est toujours bloqué sur la station spatiale internationale.