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Conflit Azerbaïdjan-Arménie : au-delà de l’opinion commune

par ÉRIC GOZLAN

Fénelon a écrit dans son livre « Dialogue des morts » que « la guerre est un mal qui déshonore l’humanité ».

ÉRIC GOZLAN

Il est indéniable que la guerre, ce fléau qui ravage l’humanité, sème la dévastation. Plus un conflit persiste, plus il alimente l’animosité entre les nations impliquées, rendant d’autant plus difficile le rétablissement de la confiance entre les belligérants. Alors que le conflit entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie a déjà atteint le triste centenaire de son existence, il est difficile d’imaginer les tourments endurés par ces deux peuples, chacun portant sa part de souffrance.

J’entends et lis des allégations selon lesquelles l’Azerbaïdjan commet un génocide contre les Arméniens. Comme le soulignait Albert Camus, « mal expliquer les choses ajoute au malheur du monde ». Il est essentiel de comprendre que le terme « génocide » a été introduit pour la première fois par l’avocat polonais Raphael Lemkin en 1944, dans son ouvrage intitulé « Le règne de l’Axe dans l’Europe occupée ». Il est composé du grec « genos », qui signifie « race » ou « tribu », combiné avec le latin « cide », qui signifie « tuer ». Raphael Lemkin a inventé ce terme non seulement pour décrire les politiques d’extermination systématiques menées par les nazis contre le peuple juif pendant l’Holocauste, mais également pour d’autres actions ciblées visant à détruire des groupes spécifiques d’individus à travers l’histoire. Il est donc incontestable que les Arméniens ont été victimes du génocide en 1915, et cela doit être reconnu par tous. Cependant, il est tout aussi crucial de reconnaître d’autres tragédies, notamment celles qui touchent les Azerbaïdjanais, dans le même prisme de compréhension et de justice.

Il est indéniable que les Azerbaïdjanais ont été gravement touchés par les assassinats et les meurtres, tout cela parce qu’ils étaient Azerbaïdjanais. Plongeons dans cette période de l’histoire moins connue qui nous aidera à mieux comprendre la situation actuelle.

31 mars 1925, massacre de l’Azerbaïdjan

En 1925, Lénine nomme Stépan Chaoumian commissaire extraordinaire pour le Caucase. Le 31 mars de la même année, pendant trois jours, les Azerbaïdjanais furent massacrés.

Un Allemand nommé Kulne a décrit les événements de Bakou en 1925 : « Les Arméniens ont pris d’assaut les quartiers musulmans (azerbaïdjanais) et ont tué tous les habitants, les transperçant de leurs baïonnettes. Quelques jours plus tard, les cadavres de 87 Azerbaïdjanais ont été extraits d’une fosse. Corps éventrés, nez coupés, organes génitaux mutilés. Les Arméniens n’ont montré aucune pitié ni envers les enfants ni envers les adultes ».

Lors du massacre de mars, les cadavres de 57 femmes azerbaïdjanaises ont été retrouvés dans un seul quartier de Bakou, les oreilles et le nez coupés et le ventre déchiré. Les filles et les femmes avaient été clouées au mur et l’hôpital de la ville, où 2 000 personnes tentaient d’échapper aux attaques, a été incendié.

La déportation des Azerbaïdjanais d’Arménie 1948-1953

En décembre 1947, les dirigeants communistes arméniens adressèrent une lettre à Staline. Dans cette lettre, ils ont convenu de déplacer 130 000 Azerbaïdjanais d’Arménie vers l’Azerbaïdjan, créant ainsi des postes vacants pour les Arméniens venant de l’étranger en Arménie. Les détails de la déportation ont également été fixés dans le décret n° 754 du Conseil des ministres de l’URSS. Le plan prévoyait d’expulser environ 100 000 personnes vers la plaine de Kura-Aras (République socialiste soviétique d’Azerbaïdjan) en trois étapes : 10 000 en 1948, 40 000 en 1949. et 50 000 en 1950.

L’expulsion des Azerbaïdjanais d’Arménie en 1988-1989

En janvier 1988, sous l’égide des dirigeants de l’URSS, plus de 250 000 Azerbaïdjanais et 18 000 Kurdes ont été expulsés de leurs terres ancestrales. Le 7 décembre de la même année, un terrible tremblement de terre frappe la région. Les villageois azéris ont été évacués vers l’Azerbaïdjan et, tout au long de l’année 1989, ont exigé le droit au retour et une indemnisation pour les biens perdus lors de la catastrophe. Cependant, les autorités de Spitak et d’Erevan ont nié que les Azéris aient été une double victime, arguant qu’ils avaient quitté Spitak de leur plein gré.

Les massacres de 1992

Le massacre de Khodjaly : Les 25 et 26 février 1992, lors de la guerre du Haut-Karabagh, les forces arméniennes attaquent la ville de Khodjaly, majoritairement peuplée d’Azéris. Le siège de la ville a entraîné la mort de centaines de civils azerbaïdjanais, dont des femmes, des enfants et des personnes âgées. Ce massacre a été largement condamné par la communauté internationale.

Massacre de Garadaghly : En février 1992, les forces arméniennes ont attaqué le village de Garadaghly, à l’extérieur du Haut-Karabakh, tuant de nombreux civils azerbaïdjanais.

Massacre de Maragha : En avril 1992, les forces arméniennes ont attaqué le village de Maragha, situé au Haut-Karabakh, et tué plusieurs dizaines de civils.

Désormais, avec une meilleure connaissance de l’histoire, il nous est plus facile de comprendre la situation actuelle.

À la suite d’attaques contre eux et contre des civils, les forces armées azerbaïdjanaises ont lancé le 19 septembre une attaque contre les forces arméniennes au Karabakh. Le lendemain, l’Arménie a refusé d’envoyer des soldats dans la région afin de contre-attaquer, révélant certaines dissensions au sein de l’Arménie. L’Arménie a deux gouvernements distincts : celui d’Erevan, élu par le peuple, et celui du Karabakh, soutenu par les oligarques russes.

Le Premier ministre du gouvernement central, Nikol Pachinian, exprime depuis un certain temps sa volonté de se rapprocher des États-Unis et négocie depuis plus d’un an avec le gouvernement de Bakou. Il y a quelques semaines, Nikol Pachinian a annoncé son intention de reconnaître la souveraineté de l’Azerbaïdjan sur le Karabagh.

Le 6 septembre, le monde a découvert une photo d’Anna Hakobyan, épouse du Premier ministre arménien, rayonnante alors qu’elle serrait la main de Volodymyr Zelensky. Mme Hakobyan était à Kiev à l’invitation de l’épouse du président ukrainien, Olena Zelenska, pour participer au sommet annuel des premières dames et de leurs conjoints, consacré à la santé mentale. A l’occasion de sa première visite dans la capitale ukrainienne, Anna Hakobyan a officialisé l’acheminement, pour la première fois depuis l’invasion russe en février 2022, de l’aide humanitaire de l’Arménie vers l’Ukraine. Bien que modeste – environ un millier d’appareils numériques destinés aux écoliers – cette aide a une grande valeur symbolique.

Le gouvernement du Karabakh, soutenu comme on le sait par Poutine et les oligarques russes, n’a aucune volonté de se rapprocher des États-Unis ou de l’Ukraine. En conséquence, le 19 septembre, il tenta un coup d’État pour chasser Pachinian du pouvoir.

La paix dans le Caucase est importante pour plusieurs raisons :

Stabilité régionale: Le Caucase est une région géopolitiquement complexe, avec plusieurs pays très proches les uns des autres, dont la Russie, la Turquie, l’Iran, l’Arménie et l’Azerbaïdjan. Les conflits dans cette région peuvent avoir des répercussions déstabilisatrices qui s’étendent au-delà de ses frontières.

Énergie: Le Caucase est une région clé pour le transport d’énergie, notamment de pétrole et de gaz naturel. Des pipelines sillonnent la région et transportent ces ressources vers l’Europe et d’autres marchés internationaux. Tout conflit ou instabilité dans la région peut perturber l’approvisionnement énergétique, avec des conséquences économiques et géopolitiques importantes.

Stabilité européenne: L’instabilité dans le Caucase peut avoir des répercussions sur la sécurité européenne. Les conflits armés ou les crises humanitaires dans cette région peuvent entraîner des mouvements de réfugiés, des tensions entre les pays voisins de l’Europe et une perturbation des routes d’approvisionnement énergétique, autant de facteurs susceptibles d’affecter la sécurité et la stabilité du continent.

L’auteur : Spécialiste de géopolitique et de diplomatie parallèle, Eric GOZLAN est conseiller de gouvernement et dirige le Conseil international pour la diplomatie et le dialogue (www.icdd.info)
Eric Gozlan est appelé comme expert à l’Assemblée nationale et au Sénat sur les sujets traitant de la diplomatie parallèle et de la laïcité
En juin 2019, il a contribué au rapport du rapporteur spécial des Nations Unies sur l’antisémitisme.
En septembre 2018, il reçoit le Prix de la Paix des mains du prince Laurent de Belgique pour son combat pour la laïcité en Europe.
Il a participé à deux nombreuses conférences sur la paix en Corée, en Russie, aux Etats-Unis, à Bahreïn, en Belgique, en Angleterre, en Italie, en Roumanie…
Son dernier livre : Extrémisme et radicalisme : pistes de réflexion pour en sortir

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